Ils sont gorgés d’eau, tous et chacun,
comme des salades, et plutôt
ravagés,
marqués par le cours des choses,
sales.
Dieu sait que je les aurai voulus autres —
moins préoccupés, plus désinvoltes,
moins à manipuler-avec-précaution,
plus légers,
moins accros
aux rêves impossibles, moins périssables,
un peu plus ouverts
aux bains de soleil.
Ils ne sont pas à la hauteur.
Sont imprévisibles.
Il leur vient comme ça des oignons.
Mais ils importent
avec leurs sourires espiègles,
leur air toujours distrait,
leurs pauses subites —
autant d’indications qu’ils savent
comment les tiges vertes se contorsionnent
et grossissent
en disparaissant
dans le noir,
frayant leur chemin
dans leur propre et adipeuse substance
de boue,
en improvisant,
en gaffant,
en improvisant —
Arundhathi Subramaniam, « Mes amis », When God is a Traveller, Bloodaxe Books, Hexham, Grande-Bretagne, 2014, p. 14-15. Traduction de François Hébert.